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- mars 29, 2023
Rdc-Politique: L’énigme Mwangachuchu

Son nom défraie la chronique dans le pays et surtout dans les médias. Sur les réseaux sociaux, l’homme y a presque élu domicile, installé par la chronique de mauvaise grâce. “Elu” ou député nommé du Nord-Kivu, Edoaurd Mwangachuchu fait la une des médias, papier et en ligne depuis que son nom est mêlé à la rébellion du M23 dont chacun sait qu’elle est le paravent de l’armée rwandaise qui occupe des territoires congolais du Nord-Kivu.
Edouard Mwangachuchu est jugé par la cour militaire à Kinshasa après que les renseignements militaires eurent découvert dans une de ses nombreuses résidences dans la région, une cache d’armes et munitions de guerre. La toile n’a pas tardé de s’emballer pour dresser un portrait de l’homme qui ressemble, à quelques points près, à celui d’un véritable monstre.
Sur la toile, Mwangachuchu est un vrai serpent qui a réussi à dissimuler, des années durant, sa vraie nature de traître à la cause congolaise. Intox ou propagande, on le présente comme le bras droit de l’ogre des Grands lacs, Paul Kagame dont il serait même voisin par sa résidence à Kigali.
Mwangachuchu serait, selon ce portrait dressé par les réseaux sociaux, l’homme orchestre de la prédation et du pillage rwandais de nos ressources naturelles, le coltan en l’occurrence. De ce minerais précieux qui entre dans la fabrication des appareils téléphoniques, Mwangachuchu détiendrait à lui seul les “trois quarts du territoire de Rubaya”, dans le Nord-Kivu.
Avancé sans la moindre preuve, toutes ces affirmations lourdes qu’aucune source officielle crédible ne peut confirmer ni infirmer, alourdissent dans l’opinion un dossier sécuritaire déjà pas facile à gérer pour le pays. Et loin des mines de Rubaya, comme pour démontrer la puissance de l’infiltration des institutions ou la faiblesse maladive de ces mêmes institutions face à ce qui est perçu comme une occupation quasi achevée du pays par une puissance étrangère, un posting sur les mêmes réseaux sociaux attribue au même individu la propriété de l’immeuble du gouvernement dit “immeuble intelligent”.
Et sans discernement ni esprit critique, de nombreux groupes whatsapp se sont emballés pour relayer ce posting hallucinant. “Il ne reste qu’à lui attribuer l’échangeur de Limete”, ironise un ancien journaliste à la retraite, fin connaisseur de la classe politique congolaise mais qui jure n’avoir jamais “entendu parlé de Mwangachuchu jusqu’à ce qu’il défraie la chronique actuelle”.
Phénomène? Enigme? Qui est cet homme présenté tantôt comme un magnat sanguinaire, tantôt comme un vulgaire pion de la maffia internationale au service de Paul Kagame, lui-même exécutant et sous-traitant d’une prédation destinée à rayer la RDC de la nouvelle géopolitique du monde? Un journaliste bien connu dans la région et qui connaît la région et le personnel politique le présente comme un “notable”, “un homme d’affaires”, propriétaire de la Société minière de Bisunzu, SMB, dans la contrée de Rubaya, en territoire de Masisi.
Mwangachuchu est un Tutsi, “ancien président CNDP”, mouvement rebelle ancêtre du M23 dirigé dans sa branche militaire par un autre Tutsi rwandais, Laurent Nkunda qui tenait dans sa main gauche une bible et dans sa main droite une kalachnikov, alliant habilement imposture évangélique et cruauté. Selon la même source, Mwangachuchu fait son entrée en politique déjà à l’époque du RCD dont il fut “un des actionnaires”. “Mais comme tous les Tutsi au départ il adopte un profil bas et reste à l’ombre”.
“Il sort du bois avec le CNDP dont il est le président et en 2006, il est coopté comme beaucoup dans le Masisi où les élections se sont déroulées de la manière que l’on sait”. Et puis, il rejoint la majorité présidentielle de Joseph Kabila. Et c’est dans sa propriété de Bisunzu que les services ont découvert le pot-aux-roses qui lui attire des ennuis judiciaires actuels. Il est jugé en procédure de flagrance devant la Haute cour militaire, avec un co-accusé, officier de la police.
Sur l’homme, on rapporte aussi qu’il a vécu aux Etats-Unis d’Amérique dont il détiendrait même la nationalité concurremment avec la nationalité congolaise pourtant reputée “une et exclusive”, au terme de la constitution. La perquisition de sa résidence à Kinshasa a aussi apporté une abondante moisson d’éléments à charge aux enquêteurs qui travaillent sur le dossier.
Loin de cette image noire ou noircie, ses proches ne sont gênés pourtant de le présenter comme un ange. Là où on le dit proche de Kigali, ses proches soutiennent le contraire car, dit-on, “les Rwandais l’accusent d’avoir recouru au soutien du gouvernement congolais pour étouffer la Cooperama (Coopérative des exploitants miniers de Masisi), dirgée par Seninga mais financée par le Rwanda pour favoriser le trafic illégal des minerais”. Selon les mêmes proches, Mwangachuchu ayant déjà signé un contrat avec Microsoft depuis 2016, ne vend plus son coltan au Rwanda mais à Bill Gates.
Tel est l’homme qui écume ces jours-ci les prétoires de la Haute cour militaire, accusé de “détention illégale d’armes et munitions de guerre, atteinte à la sûreté de l’Etat”. Selon une source digne de foi, l’homme n’est pas seul dans cette entreprise criminelle, “d’autres personnalités de la province siégeant dans dans diverses assemblées restent encore impunies”.
Plusieurs voix s’élèvent pour demander à Christophe Mboso, le speaker de la chambre basse du Parlement de citer des noms qu’il doit connaître, lui qui, il y a déjà plus d’une année lançait aux députés ; “quittez les groupes armés”, sans citer des noms. Peut-être que Mwangachuchu ne voudra pas mourir seul. Encore faut-il qu’il avoue déjà son forfait, lui dont les avocats multiplient des dilatoires pour lui éviter la rigueur de la loi.
YONGO DATCH.