réception du prix Nobel de la Paix à Oslo le 10 décembre dernier, Maria Ressa a eu ces mots : “ sans vérité il n’y a pas de confiance et sans confiance il n’y a ni réalité commune, ni démocratie…” avant de poser cette question sous forme d’interpellation.“qu’êtes-vous prêt à sacrifier pour la vérité?” Avant de répondre à cette question, établissons ce qu’est la vérité.La définition philosophique de la verité parle de “connaissance reconnue comme juste, comme à son objet et possédant à ce titre une valeur absolue,ultime”. En d’autres termes, la vérité est ce qui est conforme à la réalité. Elle a donc un caractère objectif. Une objectivité
consacrée par les nombreux indicateurs à notre disposition pour l’évaluer, comme ceux que nous citons plus haut.
Pourtant, on constate en RDC une tendance quasi systématique au sein de l’élite politique à ignorer ou nier les faits qui sous tendent la vérité dès lors qu’ils ne cadrent pas avec la narration officielle ou les intérêts personnels de ces dirigeants. Cette obsession à vouloir masquer ce qui est vrai avec des récits fictifs (souvent sans la moindre substance empirique) contribue au sous développement chronique du pays. Les auteurs de ces fictions et ceux qui leur font écho sont selon moi un danger pour la République. Deux mondes coexistent en République Démocratique du Congo. Le premier, fictif, fait l’apologie décomplexée des anti-valeurs ou passe éhontément sous silence les faits qui dérangent. Les responsables de la déliquescence de l’État y sont érigés en héros par une meute de fanatiques ou de courtisans incapables de comprendre qu’ils sont eux-mêmes otages d’un avion en perte d’altitude piloté par des kamikazes. Le deuxième monde, empirique, est celui des statistiques évoquées ci-dessus. La réalité y est si dure qu’elle est devenue un chemin de croix pour les Congolais meurtris, entre autres, par la guerre et la pauvreté. Pour relever les innombrables défis auxquels notre pays est confronté, il nous faut une réalité partagée. Un monde. Pas deux. Autrement dit, il nous faut un ancrage collectif dans la vérité, aussi brutale soit-elle. Il faut replacer le débat rationnel et les faits au centre des échanges. Il faut revenir au règne de la logique et de la science et anéantir l’obscurantisme intellectuel qui a élu domicile dans notre pays.
La RDC souffre d’un rapport biaisé à la vérité, ou en tout cas à la réalité, et c’est principalement la faute de son élite politique. Cela ne peut plus durer. La vérité mérite tous les sacrifices.